10 Décembre
Aujourd’hui, poursuivons notre exploration du récit biblique de la Nativité avec cette œuvre tardive de Domenico Ghirlandaio (1448-1494), réalisée en 1491. Contemporain de Sandro Botticelli, le nom de Ghirlandaio, signifiant littéralement « faiseur de guirlandes », provient du métier de son père, un orfèvre renommé pour ses guirlandes élégantes. Ce retable fut commandé par Lorenzo Tornabuoni, un cousin de Laurent le Magnifique, pour sa chapelle familiale de l’église Santa Maria Maddalena dei Pazzi à Florence. Il illustre la Visitation, un épisode raconté dans l’Évangile selon Luc où, suite à l’Annonciation, la Vierge Marie rend visite à sa cousine Élisabeth, elle-même enceinte de saint Jean Baptiste.
Loin des montagnes de Judée, le peintre met en scène ses personnages devant un arc de triomphe, symbole de la grandeur de l’Antiquité classique, qui encadre les figures et confère monumentalité et solennité à l’image. L’arc est orné de plaques de marbre, mais aussi d’une frise décorative avec un motif de coquillages, symboles de fécondité, agrémentés de perles et de pierreries. A l’arrière-plan, un port évoque la diffusion du message biblique à travers le monde, tandis que la représentation de monuments tels que le Panthéon, vise à ériger Rome en tant que nouvelle capitale de la chrétienté.
Domenico Ghirlandaio apporte beaucoup d’humanité à la scène à travers son utilisation gracieuse de la gestuelle. Élisabeth, agenouillée comme pour vénérer Marie, est accueillie avec douceur et humilité par cette dernière, qui pose délicatement ses mains sur les épaules de sa cousine plus âgée. De part et d’autre, des inscriptions dorées permettent Marie Jacobé et Marie Salomé, é, elles aussi représentées enceintes. Elles sont respectivement les mères de saint Jacques le Mineur et Jude, et de saint Jacques le Majeur et saint Jean l’Évangéliste. Leur présence, inhabituelle dans une Visitation, pourrait être interprétée comme une anticipation des futures missions apostoliques du Christ. L’accent mis sur la maternité des quatre figures féminines pourrait refléter une allusion personnelle au récent décès de l’épouse enceinte de Ghirlandaio.
Ghirlandaio partageait avec Botticelli une quête de beauté idéale et un sens du raffinement propre à la Renaissance florentine, bien que son art se distingue par un ancrage plus tangible et une esthétique moins éthérée. Ses figures féminines se distinguent par une palette de couleurs primaires. Le bleu profond du manteau de Marie, le rouge éclatant de ses manches et le jaune doré du vêtement d’Élisabeth, rehaussés de reflets lumineux, mettent en valeur les plis délicats et la richesse des tissus. Formé à l’orfèvrerie par son père avant de se tourner vers la peinture, Ghirlandaio combine dans La Visitation maîtrise technique et sens de la narration, offrant une œuvre où se conjuguent harmonieusement la tradition antique et l’innovation de la Renaissance.