A la première exposition impressionniste, Pierre-Auguste Renoir exposa sept œuvres, cette représentation saisissante (et littérale !) du spectacle de la vie moderne. Dans ce tableau, nous sommes transportés dans l’ambiance feutrée d’un théâtre. Un couple élégant y est installé dans une loge, et semble assez peu intéressé par ce qui se déroule sur scène. La femme – peut-être une courtisane ? – occupe le plus clair de la composition dans un cadrage serré, formant avec sa robe une somptueuse pyramide de rayures noires et blanches. Elle a baissé ses jumelles et reposant son bras ganté sur la rampe. L’homme, quant à lui, utilise les siennes pour regarder ailleurs dans l’assistance !
Les modèles de Renoir étaient son frère Edmond Renoir, et Nini Lopez – modèle montmartroise cruellement surnommée « Gueule de Raie » à son époque. Mais le plus surprenant est certainement le point de vue fantaisiste choisi par le peintre. En effet, nous observons la loge de l’extérieur, tout en étant à proximité et à la même hauteur que les personnages. Peut-être a-t-il utilisé, lui aussi, ses jumelles ? Dans tous les cas, Renoir cherchait vraisemblablement à exposer, non sans malice, le manège social qu’incarnait le monde du théâtre à cette époque.
Dans les années 1870, l’industrie du théâtre dominait la vie culturelle parisienne. On estime à plus de 200 000 le nombre de billets vendus chaque semaine à Paris. Aussi, les loges des théâtres n’étaient plus réservées à l’élite, mais devenaient accessibles à la classe moyenne montante. Le théâtre et l’opéra s’imposèrent rapidement comme des lieux non seulement pour voir, mais aussi et surtout pour être vu(e). Ainsi, la jeune femme se donne en spectacle, tandis que l’homme étudie le public avec ses jumelles.
Pierre Auguste Renoir rend la scène avec une touche très libre et visible, tout en parvenant à rendre les détails somptueux de la robe, des perles, du corsage, mais aussi des boucles d’oreilles. Pour autant, il ne rend jamais les contours précis de chaque élément. L’impression de l’ensemble est rendue à la perfection grâce aux reflets lumineux sur les parures et les matières des vêtements, renforçant le caractère sensoriel du tableau. La femme est représentée avec une grâce évanescente, les roses dans ses cheveux et son corsage ajoutant une touche de délicatesse à sa tenue. Ces détails subtils renforcent le réalisme de la scène, tout en soulignant l’attention particulière portée aux apparences et aux signes de statut social.
Acquise par Samuel Courtauld en 1925, La Loge est devenue l’un des chefs-d’œuvre de sa collection et continue de fasciner les spectateurs du monde entier, offrant un aperçu captivant de la vie sociale et culturelle du XIXe siècle.
Je ne suis pas une fan de Renoir mais ce tableau est tout à fait éblouissant, même en noir et blanc!
Pour tout t’avouer, moi non plus 😉 du moins pas son œuvre plus tardif, mais j’aime sa production purement impressionniste! merci pour ton message!
Votre commentaire donne une bonne raison pour laquelle Renoir a voulu peindre un couple dans une loge au théâtre, très interessant, je ne m’étais jamais posé la question 🙂 J’aime beaucoup regarde toutes les nuances dans les blancs, il me semble qu’il n’y a pas de blanc pur mais toujours quelque nuance de bleu, gris, rose, jaune, etc! Je trouve ça très beau et j’aime le contraste avec les rayures noires de la robe. Merci
Merci Odile! C’est vrai, le « blanc » n’est finalement que le reflet de la lumière et des objets aux alentours. Donc le jaune des dorures et des bougies, le vert des feuilles du corsage etc. Et c’est vrai que le noir permet à l’ensemble de s’exprimer.